Arraché à l’affection du monde de l’art et de la culture le 29 juin 2012 Alphonse YEMADJE, 11 ans déjà! La légende continue…

 

Alphonse YEMADJE, avec quelques-unes de ses tentures

Décédé un soir du vendredi 29 Juin 2012, cela fait onze (11) ans ce jeudi 29 Juin 2023 que Alphonse YEMADJE, grand artiste plasticien béninois a terminé sa mission sur terre. Le passé de l’homme renseigne bien sur ce qu’il a apporté comme plus-value à son pays le Bénin, l’Afrique et le monde à travers la finesse et le doigté qui caractérisent ses œuvres. Des séances de prière sont prévues en ce jour anniversaire du décès du prince d’Abomey sans oublier qu’une messe sera dite en son honneur à Abomey-Calavi.

Les larmes n’ont plus leur place. Elles sont séchées, absorbées. Mais comme un vent sec comme celui de l’harmattan, la personnalité reste présente dans le temps mais pas saisonnière. Elle vit pour toujours puisque ses œuvres n’ont pas disparu surtout dans les grands musées du monde. Comme une tâche indélébile, l’artiste fleurit dans le cœur des Béninois, Africains et occidentaux qui l’ont connu et qui continuent de restituer son histoire à travers ses œuvres. La chaire a cédé place à une nouvelle entité, l’âme. Cette dernière continue de maintenir en vie Alphonse YEMADJE. L’artiste n’a jamais connu la mort si ce n’est la première couche de la vie, le vécu physique, sinon, il vit toujours. En témoigne les nombreuses tentures de l’illustre artiste qui se retrouvent actuellement dans plusieurs musées du monde, notamment : le musée de Quai Branly, le musée de l’Homme (Paris/France) et le musée de Brasilia (Brésil) et autres, Etats-Unis, l’Angleterre, des pays d’Outre-mer sans oublier de grandes universités dans le monde. Dans un passé récent, Alphonse YEMADJE a ressourcé l’histoire de la cité Kpassè(Ouidah) à travers des vestiges sortis des terres. Trop discret dans son pays le Bénin, Alphonse Yèmadjè est très connu dans le monde de par ses toiles. Descendant direct des artisans royaux d’Abomey, il s’est invité dans le sanctuaire des toiles d’Abomey dès son jeune âge aux côtés de son géniteur Hêmadou Yèmadjè. Les tapisseries (les appliqués) en général constituent en fait, des éléments fondamentaux dans la culture Fon. Elles commémorent des événements majeurs et servent d’appui à tous ceux qui, faisant recours à la tradition orale, tiennent à garder vivante la mémoire collective. Ainsi, après quelques années à Abomey, l’artiste finit par s’installer à Cotonou en 1942.

Défenseur de la France, holocauste pour la France

Avant de se consacrer définitivement à l’art plastique, Alphonse Yèmadjè a été enrôlé dans l’Armée française comme «Tirailleur sénégalais ». Il a participé à plusieurs opérations de guerre dont celle de 1946 en Indochine, aujourd’hui ‘’Vietnam’’. L’Ancien combattant de l’Armée française a pris part à la sanglante bataille de Diên Biên Phu qui a vu la défaite de la France en 1954. La surface du camp ayant considérablement diminué au cours du mois d’avril, une part de plus en plus importante du ravitaillement parachuté tombe chez l’ennemi. Du côté français, le manque de munitions devient très préoccupant, en particulier pour l’artillerie, et la situation sanitaire tourne à la catastrophe, avec des centaines de blessés entassés dans les différents postes de secours. L’assaut final est lancé le 1er mai au soir, précédé d’une préparation d’artillerie extrêmement intense qui dure trois heures. Les divisions 312 et 316 attaquent la face Est du camp retranché, la 308 la face Ouest. L’artillerie et l’infanterie françaises n’ont plus les moyens ni les effectifs suffisants pour faire face à cet assaut massif et généralisé. « Éliane 1 » tombe dans la nuit du 1er et seuls quelques éléments du II/1er RCP, l’unité qui tenait la position, parviennent à s’en échapper vivants. « Dominique 3 » et « Huguette 5 » tombent à leur tour dans la nuit du 2. Entre tous ces événements, Alphonse Yèmadjè triomphe de la mort. Très doué à la radio, il a sauté la mine sur le champ de bataille. Plusieurs semaines durant en comas, il prend le dessus sur la mort. Bien après, il a aussi participé aux opérations de maintien de paix en Algérie. Détenteur de la médaille commémorative de la guerre d’Indochine, de la médaille coloniale, celle des volontaires et enfin la médaille commémorative de la guerre d’Algérie, il a été un vrai défenseur de la cause Française, seulement, la France n’a pas été reconnaissante. Une pension dérisoire perçue des années durant pour répondre aux besoins vitaux de toute une famille, le regret creuse le trou à la maladie en 2021. Il eût la vie sauve, mais entre 2010 et 2012, il lutta contre un mal de santé qui finit par l’emporter le 29 Juin 2012 au Centre National Hospitalier et Universitaire (CNHU-HKM).

Retour au bercail, c’est mieux mais…

Très attaché à ses origines, Alphonse Yèmadjè a eu ses heures de gloire quand, suivant les conseils de M. Chevalier, un responsable de l’Office national de l’artisanat et de l’hôtellerie (Onatho), actuel Centre de Promotion de l’Artisanat (CPA) pendant la période révolutionnaire. En retournant à la source, il reprit la tradition ancestrale des cotons tissés, alors que les tissus importés (les «Boussac ») s’étaient imposés dans l’artisanat des «appliqués». L’artiste reçoit le diplôme d’honneur de la foire de l’Indépendance de Cotonou en 1974 sous le Général Mathieu Kérékou.

Les fables Réconfortent Alphonse…

 

Les qualités de ses tentures et la singularité de ses applications lui ont permis d’être repéré par Dominique Mondoloni, Directeur de l’Opération de Lecture Publique au Bénin dans les années 1994 pour un projet dédié à l’illustration des Fables de la Fontaine. La France devrait commémorer le tricentenaire de la mort du fabuliste Jean de la Fontaine en France en 1995. Après une sélection effectuée sur le tout continent africain, le choix a été porté sur deux Béninois, venant de la même collectivité, ‘’YEMADJE’’. Il s’agit de Alphonse YEMADJE et Julien YEMADJE. La vingtaine de tableaux réalisés interprètent un dialogue culturel entre l’œuvre du fabuliste français et l’imaginaire de l’artiste béninois. Le chef-d’œuvre fit le tour de la France et du monde et recueille de grands succès. Mais dans son propre pays, l’artiste n’a jamais bénéficié d’un soutien particulier de ses dirigeants. Car, l’artiste et l’art étaient considérés jadis comme des moins que rien, des farfelus, bref des fous, des indigents, bref, ceux qui mélangent la vie négativement.

Soglo immortalise Alphonse….

Plusieurs expositions ont été réalisées et ont connu un grand succès dans des universités, écoles et centres de loisirs français. Les appliqués d’Alphonse Yémadjè figurent en bonne place dans plusieurs musées dans le monde. Les toiles du digne fils du Bénin sont toujours inspirées par la culture de sa terre natale. Ce qui a suscité l’admiration des diverses délégations présentes à Cotonou en 1995 lors du 6ème Sommet de la Francophonie. Les Chefs d’Etat et de Gouvernement sont repartis chacun dans leur pays respectif avec les toiles appliquées des fables.

En reconnaissance aux loyaux services rendus à la nation, Alphonse Yèmadjè a été élevé au grade de Chevallier de l’Ordre du mérite du Bénin par le Président Nicéphore Soglo en décembre 1995. Un titre de champion à vie que la République a offerte à Alphonse Yèmadjè de son vivant. En le faisant ainsi, le Président Nicéphore Soglo a rendu immortel l’homme qui, de l’autre côté pourrait le brandir comme un trophée pour exprime combien il a apporté une plus-value à l’humanité.

Deo Gratias HEMADOU (Coll)

Alphonse YEMADJE, avec quelques-unes de ses tentures

Photo : Alphonse YEMADJE, avec quelques-unes de ses tenture

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